Ces papiers d'Amérique(s) sont aussi à leur manière les papiers d'un jour.

Un journal, peut-être ? Un carnet, plus sûrement. Des notes et des impressions. Des textes gouvernés par la circonstance. Improvisés quand il faut. Mal écrits souvent, à la hâte ou sur le vif.

D’une intention encore mal éclaircie. Ils (se) cherchent moins quelque patronage littéraire qu'à découvrir cette intention.

Des papiers, encore. Drôle de matière. Moins emblème que dissonance, lorsqu’on les mesure à leurs ponctuations numériques. Il arrive toutefois qu'ils s’accordent avec le sens qu'ils possèdent en langue anglaise. Ils (re)deviennent alors une catégorie du discours.

Ce sont généralement plutôt des brèves, des citations ou des gloses. Des bouts d'expérience, qui deviennent par accident métaphores. Des morceaux d'actualité. Et pour tout dire, les digressions y occupent le centre.

Les dates qui leur répondent, aléatoires ou affectives, ne tiennent elles-mêmes que de fendre un peu des événements de nature très diverse, intimes ou publics, quelconques - incertains.

Pour l'essentiel, tout y est vu d'ici.

mardi 17 octobre 2017

NON-STYLE


Traversant à pas vifs « Une nouvelle stylistique » de Deleuze – ce terrain dont il se fait un concept véritable, propre, mais dans lequel il m’est difficile de le suivre. Des ambiguïtés notables, malgré la métaphorique déclinée autour des « variations finies ou infinies » ou la « modulation de la langue » ou encore « le moulage à action interne », « la mise en variation des variables » (Deux régimes de fous, p. 345) puis la « ligne bifurcante et brisante » (p. 346) qui inaugure une autre rationalité déjà, ex-orbite la catégorie et ses origines. Et le passage de style au pluriel des « processus » (p. 343) ; ou par arrimage bakhtinien – l’approche « polyphonique » ou « contrapuntique » (p. 344) – ces langues à l’infini dans la langue jusqu’à ce lieu commun devenu personnel bien qu’emprunté à Proust et relayé par Kafka et Beckett, celui de la langue étrangère. Le plus intriguant n’est pas la reprise de cet autre argument convenu à propos de Balzac : « il n’a pas de style » mais en ce que « ce non-style est précisément le grand style, ou la création du style à l’état pur » (id.), lequel s’achève par bégaiement et balbutiement – un nœud déplié dans Critique et clinique – par la proposition : « le style apparaît comme non-style, et constitue la folie de la langue, son délire » (p. 346). Le grand style à première vue prend dans l’histoire et les typologies rhétoriques de l’âge classique (voir synthèse de Marc Fumaroli à ce sujet) ; mais il est inconsciemment ici filtré par le débat manière-originalité-style-universalité de la période romantique (Goethe, Hegel), ce qui est tout autre chose. Tout ceci à quadriller en détail.